Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

Édito de janvier
VIVENT LES VIEILLES ET VIVENT LES VIEUX


DU TEMPS POUR VIVRE
Si j’ai réalisé plusieurs spectacles sur la vieillesse et la grande vieillesse c’est que les vieilles et les vieux m’ont toujours attiré.
En particulier celles et ceux qui ne renoncent jamais à emmerder le monde.
Dès mon premier spectacle en 1978 « Je sors donc je rentre » puis en 1980 « Susie pourquoi tu pleures ? », je jouais de vieux hommes et des vieilles femmes. De nouveau en 1986 dans « Cette nuit j’irai fleurir ma tombe ».
En 2007 Les mémés rouges ripostèrent (pendant 4 ans et plus de 150 représentations) à l’ascension de Sarkozy au pouvoir avec « WOMEN 68 même pas mort ».

Et le dernier « L’Effacement » joué pour la dernière fois durant le festival Auteurs en acte de Bagneux le soir des crimes de masse du 13 novembre 2015.
Au total une dizaine de spectacles.
Comme si mon corps contenait depuis toujours un vieux, une vieille, une femme.
Aujourd’hui que je me rapproche en âge de mes personnages, je vis un certain vertige.
Comment cela finira-t-il?

Il y a quelques mois, j’ai assisté à la « première » du dernier spectacle de Marianne Faithfull. Une immense et troublante artiste, complexe et belle. J’ai assisté plusieurs fois à ces concerts depuis les années 60. Là, dans cette petite salle en Suisse où elle faisait son « retour », ce fut un choc émotionnel sans précédent. Elle arriva sur scène telle une rescapée, bouffie, se déplaçant lentement avec une canne. Tour de chant crépusculaire, subtil, pourtant chaleureux, en complicité ironique, insolente avec le public et soudain basculant dans la peur et la solitude, le trou de mémoire, le vertige de l’absence… Bref chaque chanson était un bouleversement de l’ordre artistique qui voudrait que sur scène l’interprète restitue un souvenir à peu près intact de ce qu’il fut. Restait la voix et le traitement harmonique. Mais l’apparence, la vie quoi, tout ça était violemment PRESENT. Durant ce concert embrumé, j’ai plusieurs fois juxtaposé Philippe Léotard. C’est aussi ça vieillir. Devenir multiple. C’est comme incorporer d’autres corps. Poupée russe. Vivants ou morts qu’importe. Génétiques ou fantasmatiques. Prendre des formes soudain. Maigrir brusquement, se tordre, embellir pourquoi pas. Avez-vous remarqué comme certains médicaments nivellent les corps, les grossissent, les rythment ? Je réfléchis en ce moment à un spectacle où je serais toutes ces chanteuses que j’ai absorbé d’une certaine manière. Qui font que je suis ce que je suis : Nina Simone, Janis Joplin, Dalida, Jane Birkin, Fréhel, Ami Winehouse… Pas facile de ne pas basculer dans le sordide, le mièvre, le pathétique de l’interprétation.

DU TEMPS POUR FERMER DEFINITIVEMENT
Je réfléchis… Alors que la décision a été prise de passer la première moitié de l’année 2017 à « liquider » notre structure administrative, artistique et juridique.
La raison profonde est que j’ai besoin de sauter dans le vide pour rebondir.
L’histoire de Brut de béton production doit donc s’arrêter…
Créer une entreprise artistique dans une société libérale, c’est avant tout rendre un système économiquement déficitaire pérenne.
Qui mesure à quel point il faut être génial (là, il n’est pas question d’être modeste !) pour gérer pendant 40 ans une telle entreprise mais sans faire faillite ? Merci à ma soeur Véronique Boussagol et aux administratrices successives qui auront su tenir la boutique en équilibre avec comme priorité le paiement des salaires et des charges sociales. Merci aux membres du conseil d’administration qui ont su accompagner, cadrer, réguler la centaine de créations théâtrales.
Nous fermons notre entreprise volontairement. C’est aussi un acte de création.

DU TEMPS RADIOACTIF
Depuis 20 ans, Brut de béton production a consacré 50 % de son activité et de son temps artistique et pédagogique à la radioactivité.
Sans notre rencontre avec l’ouvrage La supplication et son auteure Svetlana Alexievitch nous n’aurions pas pris un tel tournant.
Jusqu’en 2008, ce furent 10 années de folie. Plusieurs mises en scène, des tournées, des voyages, des festivals, des écrits, des conférences, des rencontres tellement importantes à Minsk et Gomel en Biélorussie et à Tchernobyl même, Ivankov et plusieurs villages en Ukraine.
Conséquence : en 2007 nous avons perdu notre conventionnement avec l’Etat à l’arrivée de Sarkozy à l’Elysée…
Mais je pense que nous l’aurions de toute manière perdu tant le Ministère des Affaires étrangères était exaspéré par notre interventionnisme en Biélorussie et en Ukraine.

Peu soutenu sur cet « engagement » par la Ville de Clermont-Ferrand pourtant jumelée avec Gomel, la ville la plus contaminée du monde (mais ce jumelage datant des temps soviétiques, il n’avait aucun rapport avec la radioactivité), notre compagnie a failli disparaître en conséquence.
De cette époque perdure notre mise en scène partagée avec Virginie Symaniec (en langue russe et biélorusse) de La prière de Tchernobyl par le Théâtre de la dramaturgie biélorussienne de Minsk. Voilà 15 ans qu’elle est représentée sur place et dans de nombreux pays de l’ex Union Soviétique.
Et puis une autre « aventure » artistique me ravit. Il s’agit de Elena ou la mémoire du futur d’après le prologue de La Supplication. Outre que ce monologue est toujours interprété par Nathalie Vannereau presque 20 ans après sa création (on ne compte plus le nombre de représentations !), il est l’objet d’une véritable mise en abîme opérée par le documentariste Joël Labat.
VASSIA, son film magnifique et atypique sera projeté à PARIS le 16 janvier 2017 à 18h et à 19h au Reflet Médicis 5, rue Champollion dans le 5ème arrondissement.

DU TEMPS ET DE L’ESPACE
2016 aura été l’année de notre APPEL DU 26 AVRIL.
Il fut entendu (10 traductions et plus de 400 événements s’y référant) et ne nous appartient plus.
Ce fut aussi l’année durant laquelle a cessé de paraître la revue CASSANDRE HORSCHAMP pour laquelle j’écrivais depuis 11 ans (fermeture au profit du site L’INSATIABLE).
Enfin, le 26 avril prochain et après 10 années de présence quotidienne, cessera la vigie quotidienne d’INDEPENDENT WHO devant l’Organisation Mondiale de La Santé à Genève. Le collectif Indépendant Who Santé et Nucléaire que Brut de béton production co-anime depuis l’origine pense qu’il est temps que l’OMS prenne ses responsabilités. Nous les avons assez alertés !
Des actions sont programmées à Genève le 26 avril 2017 à partir de 12 heures.

BONNE ANNÉE ET SURTOUT BONNE SANTÉ
Il ne faut pas se moquer de ces vœux, certes conventionnels mais tellement d'actualité.
Nous sommes à l’aube de l’année 2017 dont je redoute le déroulement comme beaucoup d’entre vous. Quelque soit le résultat des prochaines élections en France et compte tenu des chamboulements profonds dans les pays démocratiques du monde entier, notre vigilance doit être en alerte permanente. Nous aurons à être courageux, téméraire, audacieux et solidaire.
Le théâtre doit être convocable à tout moment.

Bruno Boussagol
Metteur en scène
06.08.22.79.71




Et puis en vrac... et au programme...

1/ Nous relayons un appel à souscription pour un livre collectif de photographes parmi lesquels notre ami Olivier Coulange qui poursuit depuis 25 ans un reportage sur Antonin, de son enfance autistique à sa vie d’adulte. L’exposition de ce reportage circule jusqu’en Asie.

2/ Nous relayons également ce remarquable texte de Stéphane Lhomme, Directeur de l'Observatoire du nucléaire.

3/ Lundi 16 Janvier à 20h
CYCLE LA FOLIE A L’IMAGE
au cinéma LE RIO de Clermont-Ferrand
Cycle organisé de janvier à juin 2017
Avec La Ligue des Droits de l’Homme, les CEMEA, le groupe Humapsy de l’Université Populaire et Citoyenne 63, Les Amis du Temps des Cerises, Brut de Béton Production et le collectif « Parce qu’on est là »

TAXI DRIVER
Projection suivie d’un débat
Drame psychologique de Martin Scorsese / 1976 / 1h55 / VOST Palme d'Or au Festival de Cannes 76
Interdit aux moins de 12 ans
Vétéran de la Guerre du Vietnam, Travis Bickle est chauffeur de taxi dans la ville de New York. Ses rencontres nocturnes et la violence quotidienne dont il est témoin lui font peu à peu perdre la tête. Il se charge bientôt de délivrer une prostituée mineure de ses souteneurs.
Projection suivie d’un débat avec deux spécialistes du trauma psychique : Julie Geneste-Saelens, responsable du service d’Urgences psychiatriques et psychotrauma du CHU de Clermont-Ferrand et Frederic Gelly, médecin psychiatre au Centre hospitalier Sainte-Marie, qui présentera une lecture du film sous l'angle du traumatisme, question qu'il a travaillée dans diverses publications et à travers une expérience en médecine humanitaire.
La Folie à l'Image 06 86 16 04 30
Cinéma Le Rio 178 rue Sous Les Vignes 63100 Clermont Ferrand T 04 73 24 22 62


4/Mardi 17 Janvier à 20h
CYCLE LA FOLIE A L’IMAGE
au Ciné Dyke du Puy-en-Velay
Cycle organisé par le « Collectif Parce qu'on est là » de décembre 2016 à mai 2017
Film américain réalisé par Sean Penn / 2007 / 2H22
Il s'agit de l'adaptation cinématographique du récit Voyage au bout de la solitude, écrit par Jon Krakauer en 1996, et relatant l'histoire réelle de Christopher McCandless.
Film-culte racontant le destin tragique de Christopher McCandless, cet étudiant épris d’absolu retrouvé mort en Alaska, en 1992.
Une sorte d’Easy Rider sans la cocaïne ni Harley, porté par la rocailleuse bande-son d’Eddy Vedder.
Mais pourquoi le jeune homme a-t-il rompu aussi brutalement avec son milieu pour aller périr, sans doute intoxiqué par des baies, seul, dans un bus désaffecté, perdu du côté de Fairbanks ? Lumière crue sur l’aventure de celui qui s’était rebaptisé Supertramp et permet de découvrir son véritable visage, éclipsé dans notre imaginaire par le comédien Emile Hirsch, qui l’interpréta à l’écran. En clair, Chris McCandless ne poursuivait pas seulement une quête un peu idéaliste nourrie de sa lecture de Thoreau, il a littéralement fui un milieu familial hautement toxique.
Projection suivie d'un débat avec Le « Collectif Parce qu'on est là »




5/ RAPPEL des 2 séances du nouveau film VASSIA
le 16 Janvier 2017 à 18h et 19h
au Reflet Médicis 5, rue Champollion dans le 5ème arrondissement de Paris.
Entrée gratuite.






Quelques vidéos disponibles sur internet



Svetlana Alexievitch, Prix Nobel de littérature
- La diagonale de Tchernobyl, Brut de Béton

Bruno Boussagol et les comédiennes et comédiens de Brut de béton production se réjouissent que Svetlana Alexievitch ait reçu le prix Nobel de littérature 2015.
C’est en juin 1999 que nous adaptions La Supplication pour la première fois en français. Sous le titre La Prière de Tchernobyl (titre original de l’ouvrage), puis Tchernobyl Now (tour de France des Centrales en 2002) et enfin La diagonale de Tchernobyl (à travers l’ Europe en 2006) furent données plus de 150 représentations jusqu’en 2006. Une adaptation de notre mise en scène initiale en langues russe et biélorusse est toujours au répertoire depuis 2002 du Théâtre de la dramaturgie biélorussienne de Minsk.
Nous jouons depuis 15 ans ELENA ou la mémoire du futur (également avec une version en langue russe) d’après le prologue de La Supplication.
Nous avons été 10 fois en Biélorussie et en Ukraine pour jouer nos spectacles, rencontrer les populations des terres contaminées, travailler avec les artistes pour construire des dispositifs de collaboration artistiques qui permirent entre autres projets de réaliser En attendant la Biélorussie en 2003 à Clermont-Ferrand en collaboration avec la revue Perspectives biélorussiennes.

Extraits vidéos : chantier documentaire « Ouverture pour inventaire »
Entretiens Galia Ackerman, Virginie Symaniec, Véronique Boutroux
Réalisation Samuel Wahl.


Ouverture pour inventaire : film de Samuel Wahl
Le programme OUVERTURE POUR INVENTAIRE a connu trois sessions d'octobre à décembre 2014.
On peut aussi y trouver l’amorce du premier film réalisé il y a un an, Le Milieu du Monde.
Nous vous renvoyons aussi au site d’horschamptv.



Fin de soirée : dernière création de Brut de béton production.
Fin de soirée Nous sommes dans un cabaret qui traverse le XXè siècle, de la chanson réaliste de Berlin à Paris, au Velvet underground new-yorkais. La poésie de Michel Houellebecq déjà mise en scène par Brut de Béton production il y a 20 ans est une sorte de point d'ancrage/encrage. L'extrait ici présenté est un poème sans titre issu du recueil La poursuite du bonheur. Elvire JOUVE, Bruno BOUSSAGOL, et Arnaud LAURAS creusent la scène noire de leurs "notes bleues".


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Conception Claire Durlin